Lettre ouverte à Danièle Obono et Rokhaya Diallo - Noir c'est noir, blanc c'est blanc

Lettre ouverte à Danièle Obono et Rokhaya Diallo.
Copie à Clémentine Autain  

La vie ne se résume pas à un affrontement entre Blancs et Noirs, comme voudraient nous le faire croire les racialistes, les décolonialistes ou les indigénistes. Les racisé-e-s, pour utiliser la novlangue absurde de l’écriture inclusive, commencent à nous échauffer les oreilles. Oui, les Black lives matter, mais ni plus ni moins que la vie des Blancs ou des autres êtres humains. Pour exprimer mon ras le bol et montrer à quel point on tourne en rond en blanc et noir, j’ai écrit ce texte humoristique.

Je le dédie à Danièle Obono et Rokhaya Diallo, deux figures de proue majeures de ces mouvements. Et aussi à Clémentine Autain (blanc comme un cachet d’aspirine) si prompte à relayer leurs thèses.

Paul Bruno 

 

Chère Danièle,  Chère Rokhaya,

Vous n'êtes pas des oies blanches et je ne sais pas si vous avez dû montrer patte blanche ou si c'est grâce à un mariage blanc que vous êtes dans notre beau pays. Quoi qu’il en soit, vous y avez blanchi sous le harnais. Le vin y est bon et je crois savoir que pour le blanc, vous l’aimez bien frappé. Attention à ne pas être noir car sinon gare aux blancs (de mémoire). J’ai beau être le mâle blanc honni, de grâce, ne me lancez pas de regard noir, je n’ai pas (encore) franchi la ligne blanche. Je veux juste vous regarder dans le blanc des yeux et, comme au théâtre, vous déclarer d’une voix blanche à l’une et l’autre :  « Le noir te va si bien »! Vous avez beau être connues comme le loup blanc, je vous le dis de but en blanc : Dans la vie, tout n’est pas noir ou blanc. Sauf le chocolat !

Moi qui habite près du Mont-Blanc, en hiver j’aime dévaler les pistes noires et à l’occasion faire la Vallée blanche. L’été je taquine la petite balle blanche au golf. Pourtant, même si je ne suis pas blanc comme neige, je ne ressens pas le fameux privilège blanc dont on nous rabat les oreilles. 

Moi, je n’ai pas eu besoin de nègre pour écrire mon livre, juste quelques petits noirs bien serrés et une bouteille de blanc, du blanc de blancs, pour affronter ma bête noire : la page blanche. Ce n’est pas « Le Rouge et le Noir » mais J’y écris la vérité, noir sur blanc, sans noircir le trait.

Je n’oublie pas ces longues nuits blanches où dans les effluves d’Encre Noire ( de Lalique), je contemplais le manteau blanc de l'hiver. Il faisait nuit noire, un noir d’encre, et, bien que blanc comme un linge, j’étais dans le noir; mon stylo Montblanc dans la main, ma montre Blancpain au poignet, je me faisais des cheveux blancs comme quand j'avais passé mon bac blanc.

Je n’ai pas de chambre noire pour vous tirer le portrait. Alors, sur l’écran noir de mes nuits blanches, moi je me fais du cinéma. Surtout les films noirs. Il faut dire qu’après « Série noire », « La veuve noire » ou « La Mariée était en Noir », « Noces blanches » c’est le Paradis!  J’adore aussi « Orfeu Negro. » Lors de messes noires, on y pratique la magie noire pour guérir à coup de blancs d’œufs ceux qui broient du noir. Et puis bien sûr ma série préférée « Black Mirror ». Sans oublier « Blanche Neige » ou « Tout simplement noir » pour la famille. Mais je lis aussi. J’avais aimé « Dix petits nègres » mais ce chef d’œuvre d’Agatha Christie a disparu des librairies sous son titre original. Dans son livre « La pensée blanche », je trouve que Lilian Thuram nous prête de bien noirs desseins. J’avoue que J’ai préféré « Peau noire, masques blancs » de Frantz Fanon, qui dénonce à juste titre les Blancs s’adressant aux Noirs en leur parlant petit nègre. Mais, je l’avoue, c’est « Mille femmes blanches » de Jim Fergus qui m’a fait fantasmer.

Sur la vieille télé en noir et blanc, je regarde 8-Mont-Blanc. L’homme en noir Thierry Ardisson y reçoit Pascal Nègre, Blanche Gardin et Michel Noir dans son émission « Lunettes noires pour nuits blanches. » Michel Blanc s’est décommandé ; Il est blacklisté ! on lui reproche d’avoir fait un black face. Non seulement il est sur liste noire, mais ça lui a valu un œil au beurre noir par un blanc bec.

Explication des trous noirs, histoire de Barbe Noire (le corsaire), dénonciation du travail au noir et du blanchiment d’argent sale, on parle de tout, et même d’écologie ; houille blanche ou houille noire, il faut choisir, surtout quand l’or noir provoque une marée noire en Mer Noire. C’est houleux, le ton monte : Il n’y a pas de blancs dans les débats ! Ça aurait mérité le carré blanc. Barry White, le grand Black aux dents blanches rend hommage à Gérard Blanc avant que Noir Désir n’interprète l’Aigle noir de Barbara. Omar Sy est le clown blanc de l’émission. Quant à Black M, il n’a pas été invité. 

Interrogé sur la caisse noire de Saint-Etienne, Marius Trésor entre alors dans une colère noire ; il vilipende le tribunal qui a blanchi les dirigeants. C'était cousu de fil blanc ! Loin de hisser le drapeau blanc, Marius refuse d’être le mouton noir du football ou le chat noir de l’Equipe de France. Au contraire ! avec Jean-Pierre Adams, ils en formaient avec fierté la garde noire. Aussi élégante que le Cadre Noir (de Saumur), cette charnière centrale est à marquer d’une pierre blanche. 

Pour finir, voilà Georges Blanc et sa toque blanche, qui nous montre comment monter les blancs en neige. Tout en préparant un filet de lieu noir à la poêle, il nous avoue qu’il préfère la truffe noire à la truffe blanche. Ça devrait vous plaire.

Petit conseil en passant : En cas de pertes blanches, on se rendra à la Semaine du Blanc pour renouveler son trousseau ; on en profitera pour faire un tour au rayon des produits blancs (électroménager) et des cosmétiques. On y achètera du savon noir, idéal pour blanchir la peau et éliminer les points noirs !

Les temps changent ! Dans les années 60, les Pieds noirs quittaient Alger la Blanche pour s’installer dans la Montagne Noire ou au Blanc-Mesnil ; les Russes blancs eux investissaient le Cap Nègre. Les Chaussettes Noires chantaient « Ce Diable Noir » et les Stones « Paint in black ». 

On hésitait entre la blancheur Persil et la lessive OMO, qui lave plus blanc que blanc. AJAX de son côté, nous vantait sa tornade blanche. Dans l’industrie, les Gueules noires ont laissé place aux cols blancs alors que dans la finance les chevaliers blancs sont devenus rares. Il va falloir en faire son deuil, et je ne parle pas du deuil blanc qui noircit l’horizon des malades.

Et la politique dans tout cela ! En Italie, dans les années 20, on a eu les chemises noires de Mussolini, aux Etats-Unis dans les années 60, les Black Panthers ont renforcé les Blacks Muslims, amorçant le Black Power incarné par le gant noir brandi par deux athlètes noir-américains sur le podium des J.O de Mexico en 1968. Dans les années 70, Septembre Noir terrorisa l’Europe, révélant une noirceur d’âme inconnue jusqu’alors. On a maintenant les Casques Blancs en Syrie

Le drapeau noir ne flotte plus sur la marmite, les anarchistes s’en sont emparés. Il y a plus d’un siècle, à Sarajevo, près du Monténégro, la Main Noire déclenchait la Grande Guerre. Avec le bicentenaire de sa mort, la légende noire de Napoléon refait surface ; Surprise, son épée d’or est en fer blanc.

D’autres choses restent immuables : j’aime les souris, surtout les souris blanches ; j’aime aussi les polars de la Série noire, mais aux cartes, mon jeu préféré, c’est l’Homme Noir. 

En Bretagne, on célèbre la Blanche Hermine, à Roland Garros, Rafa aligne les jeux blancs et au Vatican c’est une fumée blanche qui annonce le nouvel élu pour la soutane blanche : Habeus papam ! 

Plus grave pour vous et les apôtres de la négritude : aux échecs comme aux dames, les blancs jouent avant les noirs. Et dans le solfège, la blanche vaut deux noires. Il va falloir changer ça. Et vite!

Et puis le monde nouveau : un Noir à la Maison Blanche. Il a la barak(a) cet homme, d’ailleurs il casse la baraque. L’Afrique Noire chasse les Blancs pour s’ouvrir aux Chinois qui ne sont pas blanc-bleu vis à vis des Noirs. En France, on multiplie les livres blancs. À l’UNEF on faisait semblant, maintenant on fait sans Blancs !

On aimerait se rallier au panache blanc d’Henri IV, mais non, on est revenu au temps du Prince Noir qui dévastait la France. Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir ! Une vraie série noire ! Le peuple a beau bosser comme un nègre, parfois au noir, il se fait saigner à blanc et c’est la misère noire. On l’agresse à l'arme blanche quand on ne lui tire pas dessus, et pas toujours à blanc. D’ailleurs on ignore le chiffre noir de la délinquance.

En hiver, l’or blanc, ce n’est pas pour lui. À table, des blancs de poulet, mais pas de Dame Blanche au dessert, ni de forêt noire ! Les têtes de nègre ont même disparu des boulangeries. Résultat, le peuple voit tout en noir ; il comprend qu’il a mangé son pain blanc. 

Que le président Hollande n’ait pas de cabinet noir et Edouard Philippe une barbe noir et blanc, les électeurs s’en fichent ; pour eux, les politiciens c'est bonnet blanc et blanc bonnet ! Pas question de leur donner carte blanche ou de leur signer un chèque en blanc, encore moins de leur donner un blanc-seing, ils votent blanc. Pire, pour chasser les idées noires, on prend de la blanche. 

Roses blanches à la main, on fait des marches blanches pour dénoncer le marché noir et la traite des Blanches. Ça rappelle les années noires de la collaboration. Quant à la Covid, notre peste noire à nous, est-elle issue d’une salle blanche de laboratoire ? En tout cas, elle nous rend blanc de peur ; et pas de Flèche Noire pour nous sauver. On se console avec le Black Friday ! 

Une époque à marquer d’une pierre noire même si dans les rues noires de monde, il y a peu de blousons noirs. Au milieu des fumées noires, les Black Blocs rêvent de blanc cassé. Comme aux pires heures noires du pays, l’espoir a disparu, reste l’humour... noir !

Conclusion

Noir c’est noir, blanc c’est blanc. La vie en noir et blanc manque de couleurs.

La couleur ne fait pas l’homme. Blanc ou Noir, peu importe ! Ne faisons pas grise mine, et pas de rire jaune non plus. Au rouge de la colère préférons le vert de l’espoir sinon on pourrait finir marrons ; soignons nos bleus à l’âme, et surtout, voyons la vie en rose